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En 2021, le programme botanique et culturel « L’été au jardin » a lieu au Jardin botanique alpin de Meyrin. Il poursuit le fil rouge de Botanica, la manifestation des Jardins botaniques suisses, avec pour thème « Le changement climatique et le règne végétal – L’essor des néophytes envahissantes ». L’artiste plasticien Gilles Brusset, également auteur de la sculpture-paysage L’enfance du pli inaugurée en 2017 à Meyrin-Parc, a été invité à envahir le Jardin botanique de Meyrin avec une installation artistique Le pittoresque, l’abscisse et l’ordonnée, conçue spécialement pour l’occasion.

Comme souvent dans la conception de ses projets, Gilles Brusset s’est replongé dans l’histoire du Jardin botanique alpin. L’origine de ce « morceau de montagne » en plein coeur de Meyrin est d’abord due au propriétaire de la Villa Montgardin, Amable Gras. À l’aube du XXè siècle, ce négociant en tissus voit dans la morphologie pentue de son terrain la possibilité d’aménager un jardin qui sera une représentation idéalisée d’un paysage alpin. Rappelons qu’au début du XXè siècle, Meyrin est un village rural qui va, à partir des années 60, connaître une incroyable métamorphose. C’est à cette période qu’est construite, à Meyrin, la première cité-satellite de Suisse, une des opérations urbaines et architecturales les plus abouties. Avec le développement des zones commerciales et des cités nouvelles ainsi que de l’ensemble des infrastructures routières, le Jardin botanique se retrouve enserré comme une île au milieu du béton, une enclave de verdure dans un tissu urbain toujours plus extensif.

Gilles Brusset aime explorer les rapports entre architecture et nature, qu’il retrouve ici à travers le plan urbain de la ville et l’histoire de ce jardin. Dans ce contexte, il imagine alors une sculpture formée de lignes verticales et horizontales, en écho à l’architecture. Sa nouvelle création Le pittoresque, l’abscisse et l’ordonnée invite les formes de la cité à pénétrer dans le jardin et à faire se rencontrer l’utopie de l’urbanisation totale et la préciosité idéale des jardins botaniques. Ces sculptures-paysages nous donnent à voir ce qui est là, démultiplient les cadres et les images et suscitent un nouveau regard sur cette île de biodiversité au cœur du béton. Elles questionnent la place de la nature et du développement urbain, de l’envahissement de l’un sur l’autre mais aussi de leur cohabitation. Avec Le pittoresque, l’abscisse et l’ordonnée, on se demande si c’est le jardin qui sort dans la ville ou la ville qui pénètre dans le jardin.
L’intervention artistique prend greffe au seuil du jardin, vers les entrées, dialoguant ainsi dans cet entre-deux du jardin et de la ville.
Lorsqu’on pénètre sous et dans les sculptures, assemblage de chevrons en bois et acier recouverts de miroirs, le visiteur se trouve comme dans un labyrinthe ou une cage de reflets. Ce jeu optique créé ainsi une série de mirages, d’illusions dans laquelle il est difficile de différencier ce qui est de l’ordre de l’imagination ou du réel.

Photographie de Pierre-Yves Brunaud

Photographie de Pierre-Yves Brunaud

Photographie de Pierre-Yves Brunaud

Photographie de Pierre-Yves Brunaud

Photographie de Binocle

Les sculptures-paysages sont des portails magiques qui ouvrent sur l’archipel des jardins. Passer par le portail, c’est le premier passage vers le monde de joyaux botaniques précieux et merveilleux, de cortèges végétaux harmonieux entièrement fabriqués. A l’intérieur, lorsque l’on pénètre sous et dans les sculptures, on a l’expérience d’un labyrinthe de glaces, une volière de lumière ou une cage à reflets dont on ne devine pas toujours la sortie. Les œuvres échappent à leur statut d’objet. Elles apparaissent comme des mirages dans le jardin. On voit bien les sculptures s’effiler sur leurs contours et se fondre dans le paysage. On ne peut les détacher de leur contexte, on ne sait plus décoller la forme du fond. Plus étonnant, on verra le paysage lui-même se dissoudre, être aspiré. Avec les mailles de leur filet, les sculptures tirent à elles le paysage du jardin.

À un moment donné, l’illusion d’optique se produit, le paysage se transforme en image : la sculpture actualise le concept du jardin pittoresque. Par perception visuelle, par illusion d’optique, on ne fait plus la différence entre ce qui est un reflet et ce qui est vu par l’impression directe de la lumière sur la rétine. Encadré de miroirs, le paysage devient le reflet de lui-même, une image.

PHOTOGRAPHIE DU  SITE PRE-EXISTANT ……………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………..